Projet de décret sur le FIP 2011
PROJET DE DECRET SUR LE FIP 2011
(Séance du 18 novembre 2011)
Mme Eléanor PARKER
Monsieur le Président de l’Assemblée de la Polynésie française,
Monsieur le sénateur de la Polynésie française,
Monsieur le président de la Polynésie française,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les représentants,
Mesdames, Messieurs,
La question du Fonds intercommunal de péréquation et par là celle du financement des communes est à mon sens l’une des plus importantes que nous devrons rapidement tenter de régler. Je dis bien tenter car sa complexité et ses enjeux sont aux carrefours d’autres sujets de même envergure. Je pense ici, par exemple, à la réforme de notre fiscalité ainsi qu’à la mise en place d’une gouvernance triangulaire de notre Pays. D’ailleurs un atelier des Etats généraux était totalement consacré à ce sujet qui est central. Pour y arriver je pense qu’il nous falloir innover et, par la discussion, rendre sa place au politique.
Néanmoins, pour commencer j’ai cru bon revenir aux bases en vous livrant les quelques réflexions suivantes.
Appliquer à notre Pays les règles fixées par le conseil constitutionnel le 29 juillet 2004 conduit à dire qu’au moins 60.8 % de l’addition des budgets communaux doit être financée par des ressources propres. Ces ressources propres doivent notamment comprendre le produit des taxes communales mais peuvent être aussi le résultat d’une fiscalité partagée c'est-à-dire chez nous le FIP.
En 2009 l’addition de l’ensemble des budgets de nos communes était de 37.4 milliards. Cette même année, les communes ont perçu près de 23 milliards de francs pacifique en produits fiscaux.
En d’autres termes, 61% de leurs budgets ou encore que 63% de leurs recettes de fonctionnement étaient, cette année là, financés par l’impôt. 42% des recettes de fonctionnement étaient issues du FIP et 21% des impôts et taxes proprement communales.
Ainsi on peut dire qu’en 2009 on était dans les clous des règles constitutionnelles. Je n’invente rien. Ces chiffres sont publiés par l’Etat.
Mais cette constatation, qu’il faudrait d’ailleurs actualiser, induit deux enjeux:
Celle d’abord de la trop forte dépendance des communes vis-à-vis du FIP ?
Et
Celle ensuite de la trop forte contrainte que représente le FIP sur les finances le Pays ?
Du point de vue des communes d’abord il faut considérer le fait que le FIP représente aujourd’hui exactement deux tiers de leurs ressources fiscales. C’est ce que je veux dire quand je parle de dépendance. D’autant que les élus communaux n’ont aucun pouvoir sur les taxes sur la base desquelles le FIP est calculé. D’autant plus que le produit de ces taxes est particulièrement fluctuant. Plus encore quand on connait les querelles du Pays et de l’Etat sur l’interprétation de son mode de calcul. D’ailleurs à ce sujet, on croît rêver quand on connait la nature de certains différents. Aujourd’hui on en est à discuter la définition du verbe percevoir. Franchement, j’ai envie de leur dire de retourner à l’école à tous ces technocrates. Pour ma part, j’ai simplement pris mon dictionnaire. Il est écrit que « percevoir » signifie « encaisser ou empocher » c'est-à-dire ce qui est dans la caisse ou dans la poche. Il semble, dès lors, assez clair qu’on ne peut pas demander au pays de verser ce qu’il n’encaisse pas. Le tribunal administratif fut dans son avis assez sage mais l’Etat n’en a pas tenu compte. Le conseil d’Etat va prochainement trancher la question. Mais je pense que le problème devrait être tranché au niveau politique c'est-à-dire celui de notre assemblée.
Ce qui m’amène au point de vue du Pays. Je considère que le FIP représente aujourd’hui une trop forte contrainte sur les finances du Pays. Premièrement, nous sommes normalement compétents pour toutes les questions fiscales de notre Pays or le fait que l’Etat fixe arbitrairement le taux de partage de l’impôt nous enlève une partie de notre pouvoir sur la matière. Notamment notre pouvoir de discussion avec les représentants de communes. L’Etat devrait se contenter de fixer les bornes de la discussion. Ensuite on sait que la fiscalité ne peut être dissociée des compétences quelle doit financer. Or on sait que le budget des communes ne cesse d’augmenter. Notamment concernant les dépenses de fonctionnement qui ont progressé de 17% entre 2005 et 2009 et ce n’est pas fini. Le fait que l’Etat ait transféré du Pays aux communes un certain nombre de compétences, qu’il ait souhaité une application in extenso du CGCT et la mise en place d’une fonction publique communale vont faire déborder le vase. Le Pays n’est pas en mesure de garantir que 60.8% des ressources communales seront pour des 2/3 d’entre elles de natures fiscales. D’ailleurs ce n’est pas son rôle. C’est plus facile pour l’Etat. En situation de déficit il peut continuer d’assurer cette proportion en recourant à l’emprunt. D’ailleurs cela fait près de 30 ans qu’il n’a pas voté un budget en équilibre et qu’il emprunte pour financer ses dépenses. Nous n’avons pas ce luxe. Et puis la pression exercée par l’Etat pour un transfert plus important de fiscalité du Pays vers les communes tout en refusant de discuter la souplesse du FIP constitue là aussi une contrainte trop forte sur les gouvernements successifs.
J’en arrive maintenant à la proposition du groupe TE MANA O TE MAU MOTU :
Dans cette période d’instabilité et de récession économique, qui n’est d’ailleurs pas notre apanage, mais aussi de monter en puissance des communes et de restructuration du pays il nous semble que l’on pourrait desserrer l’étau et la dépendance en négociant un système de garanti.
Un seuil minimal doit pouvoir être assuré aux communes. Ce dernier pourrait s’organiser autour d’un contrat tripartite de stabilité.
Concrètement, le pays continuerait comme aujourd’hui d’apporter sa part via le FIP et selon les conditions actuelles si ce n’est qu’on y associerait un seuil minimal. L’Etat viendrait lui garantir le dispositif en cas de baisse du FIP en deçà du seuil.
Le rôle d’amortisseur que jouerait l’Etat se justifierait pour plusieurs raisons. D’abord, l’Etat, tout concours confondus, est actuellement en retrait par rapport au soutien financier que la Polynésie apporte au développement des communes. De plus, il reste compétent pour les « règles relatives à l’administration, à l’organisation et aux compétences des communes … ». C’est d’ailleurs lui qui leur a conféré de nouvelles compétences, qui seront pour certaines communes sont tout simplement irréalisables dans les délais impartis.
Cette proposition aurait, par ailleurs, l’avantage d’assurer le fonctionnement et in fine l’investissement des communes tout en déliant la Polynésie d’une contrainte quasi insoutenable en période de récession économique et dans le cadre fiscal actuel. Elle permettrait enfin de créer un cadre aux relations financières entre les trois parties.
Je vous remercie.