Mme Liliane MAIROTO intervient sur le Compte financier 2006 de l'Etablissement d'Achats Groupés
TE MANA O TE MAU MOTU
Madame Liliane Mairoto
Projet de délibération portant approbation du compte financier de l’exercice 2006 et affectation du résultat en report à nouveau de l’Etablissement d’achats groupés.
Monsieur le Président de l’Assemblée de la Polynésie française,
Monsieur le Président du gouvernement de la Polynésie française,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Représentants,
Chers Journalistes, chers Internautes,
Cher public, KURA ORA,
En 1985, le rôle de l’EAG se cantonnait essentiellement à la distribution de manuels et de fournitures scolaires. En 1996, l’EAG est devenu un Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial, soit une centrale d’achats qui ne peut vendre qu’à la puissance publique.
Cet établissement, qui s’autofinance à 100%, compte aujourd’hui entre 700 et 800 clients et s’il a été constaté que la moitié des Etablissements scolaires ne se fournissent pas à l’EAG, et bien depuis 2007, l’EAG s’est engagé sur le terrain en employant une commerciale qui visite les établissements scolaires pour promouvoir les produits à la vente. Cet exemple d’action commerciale, parmi d’autres, nous permet de « positiver » dans l’appréciation financière de cet EPIC.
Ce qu’il faut retenir, c’est que l’EAG, aujourd’hui, élargit ses horizons commerciaux et retravaille sa médiatisation qui a été rudement mise à l’épreuve dans le passé.
Je passerai brièvement sur les antécédents qui ont nui à l’image de cet établissement et je m’attarderai un peu plus sur le potentiel prometteur de cet EPIC.
Sans conteste, l’EAG fut un établissement public ayant subit des contraintes politiques qui ont contribué à un déséquilibre financier, pour ne reprendre que les mots sages de madame Armelle Merceron lors de la commission de l’Education tenue à ce sujet.
Si la moitié seulement des Etablissements scolaires sont clients de l’EAG, c’est parce que
1. de nombreux établissements ne connaissent tout simplement pas assez bien l’EAG ;
2. et que des produits chers et parfois de qualités déplorables ont découragé la clientélisation des établissements scolaires,
En outre, nous avons tous remarqué la dépréciation du stock de l’EAG, évaluée à 10 millions F CFP environs. Dans ces fournitures considérées obsolètes, nous trouverons des exemplaires d’un ouvrage sur les Gambier édité il y a 15 ans, des livres de cuisines, ou encore 4800 exemplaires de livres sur l’Autonomie, avec de très jolies photos mettant en valeur la relation de Monsieur Flosse et de Monsieur Jacques Chirac : c’était l’époque où l’autonomie ne cherchait pas à rebaptiser absolument la Polynésie française en « Tahiti Nui » dans une alliance d’intérêt.
Ces 4800 exemplaires d’une valeur d’un prix de revient d’environs 12 millions, finiront sans doute au pilon. Voilà la conséquence de l’exploitation politique d’un EPIC et ça s’appelle du gâchis. Aussi le support pédagogique obsolète mentionné dans la dépréciation du stock, va être écoulé grâce à une autorisation de distribution de certains ouvrages aux associations. C’est une excellente initiative. Pour ce qui est des fameux livres sur l’Autonomie, paraîtrait-il que même vendus à perte à 500 F CFP, personne n’en veut.
Ne remettons pas en cause la direction de l’Etablissement d’Achats Groupés. Le bilan financier 2006 a souligné les problèmes de trésorerie de l’EAG, mais aussi une volonté sincère de promotion commerciale et d’élargissement de la gamme des produits, toujours destinés à des Etablissements publics bien sûr. Les communes commencent également à se fournir à l’EAG qui vient de sortir récemment un catalogue en couleur répertoriant tous les produits commercialisés. L’esprit commercial de l’EAG est de mutualiser les besoins de sa clientèle mais la puissance publique doit, elle aussi, se prêter au jeu. Ainsi, le Centre Hospitalier de la Polynésie française représente tout du moins pour 2006, un partenaire conséquent. Les prévisions mesurées pour 2008, avec l’ouverture du nouvel hôpital, sont plus que positives, selon le directeur de l’EAG.
Les objectifs de cet EPIC ne sont pas de court-circuiter le secteur privé, bien au contraire : sachez, par exemple, que 100% de la papeterie de l’EAG est achetée localement ; idem pour l’informatique ou les produits jardinage.
Nous constatons que l’Opération cartable nécessite l’embauche d’intérimaires depuis 2002.
Si l’opération Cartable est grandement appréciée dans les îles éloignées, la gamme alimentation est un vif succès puisque le fret est inclus dans la transaction et que les « îliens » achètent les conserves au même prix qu’à Tahiti.
On remarquera, là encore, que la condition des îles n’est pas la même que celle de Tahiti : là où la gamme alimentaire se vend bien parce qu’elle ne subit pas le coût du fret, elle est délaissée à Tahiti parce que les Etablissements scolaires expriment la volonté de fédérer leurs besoins et voient plus d’intérêt dans l’achat d’une gamme alimentaire complète plutôt que partielle.
Enfin, il me semble important, en tant que représentante du groupe Te Mana O te Mau Motu, d’exprimer ma satisfaction de ne pas voir, pour une fois, les Archipels marginalisés : 6000 à 7000 enfants des îles éloignées ont pu bénéficier de l’opération cartable.
Hors, j’ai appris que cette Opération Cartable qui remportait un franc succès va être supprimée à la demande de la CPS qui ne semblait pas pouvoir résoudre des problèmes de décalages entre les livraisons et le nombre de cartables à faire livrer. Les commandes étant saccadées, il arrivait que certains élèves reçoivent leurs cartables 4 mois après la rentrée, ce qui rend cette initiative ridicule. La mesure de Autaeaera’a des 6000 F CFP a brouillé les cartes d’attribution de l’Opération cartable selon les revenus, et résulté en un décalage de livraison. Résultat des courses : l’EAG s’est retrouvé avec 6500 cartables en stock, soit l’équivalent de 25 millions de F CFP.
Plutôt que de supprimer une action innovante, dont les enfants sont les bénéficiaires directs, j’encourage le Ministère de l’Education à concerter la CPS et l’EAG, à trouver une solution à ces décalages de commandes. Il y va du bon sens de poursuivre cette Opération Cartables dans les îles, où le prix des fournitures est excessif. Quant à ces 6500 cartables, qu’ils ne soient pas considérés en perte, qu’ils soient redistribués. Il en est de même pour la gamme alimentaire : rendez-vous compte que le coût du fret est pris en charge par l’EAG et que le prix du ma’a est le même que celui de TAHITI.
Monsieur le Ministre de l’Education, allez-vous planifier une réunion de concertation avec la CPS et l’EAG, afin que l’Opération Cartable se poursuive, au moins, dans les îles ?
Je conclurai que voici l’exemple d’un Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial qui a sans aucun doute, été victime dans le passé, de directives politiques, mais qui finalement s’en sort plutôt bien dans la résorption de sa dette.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. J’insisterai aussi sur le fait que cet établissement a pris en considération une « douleur » des Archipels qui s’appelle le coût du fret : aussi simple comme bonjour, en permettant aux habitants des îles éloignées de payer une boîte de conserve au même prix qu’à Tahiti, en faisant partager aux enfants des îles l’opération cartable au même titre que pour les petits Tahitiens, l’Etablissement d’Achats Groupés démontre, à mon avis, une intelligence de gestion qu’on ne retrouve pas partout. Espérons que ses actions commerciales continuent à porter ses fruits, et dans l’intérêt de tous, il faudrait que les pouvoirs politiques cessent d’influencer arbitrairement les bons et commandes de l’EAG. C’est ça, le vrai changement.
Je vous remercie de votre attention.