Le service charge: Pourboire ou 13ème mois?

Publié le par TEMOTEM

 

 

 

 

Sur le projet de « Loi de Pays » relatif au service charge

Portant modification de la délibération n°91-5 AT du 17 janvier 1991

Portant application des dispositions du chapitre VI du titre 1er de

La loi n°86-845 du 17 juillet 1986 et relative aux salaires

 

 

Tout d’abord, rappelons que le choix d’aller au « service charge » plutôt qu’au pourboire, est celui des partenaires sociaux[1] : Employeurs et organisations syndicales des travailleurs[2] ont signé une convention le 12 décembre 2006 dans laquelle est inclus le « service charge ». Si le syndicat O oe to oe rima n’a pas signé cette convention, c’est parce qu’elle leur paraissait moins avantageuse pour les employés. Un représentant du syndicat nous a informé que la Convention du 12 décembre 2006 retirait certains acquis tels que le « délai carence »[3], les primes d’entreprises devenaient moins intéressantes, et les catégories avaient été modifiées et tendaient à déclasser les salariés. Quant au « service charge », le syndicat misait plus sur un 13ème mois que sur ce nouveau système. Je retiens cependant, que la convention a fait l’objet de concertations et nous discutons aujourd’hui sur un compromis qui a fait la satisfaction de la quasi-totalité des parties. En effet, l’intérêt général doit toujours primer sur l’intérêt particulier. C’est bien, ici, la philosophie de cette mesure innovante qui touche au pilier de notre économie, le tourisme.

           

Il serait faux, à mon humble avis, de penser que le Service Charge « remplace » le pourboire, même si sa vocation est de le substituer. C’est autre chose : Le pourboire se calcule différemment et il se donne sur l’impression directe que peut avoir le client d’un service, le pourboire est personnel, individuel. Aux Etats-Unis, le pourboire est systématique, les serveurs n’ont pas toujours de salaire fixe, certains ne vivent parfois qu’avec le pourboire, qui correspond généralement à 15 ou 20% de la TVA. Bien sûr,  ce système s’en fait ressentir immédiatement sur la qualité du service. Le jour où nos serveurs de restaurants pourront vivre décemment rien que sur le pourboire, nous n’aurons plus à nous soucier de la bonne santé de notre tourisme. Heureusement pour eux, aujourd’hui, tous les employés polynésiens ont un salaire fixe de base. Posons nous aussi la question de savoir, si, avant l’introduction du Service Charge, le pourboire rendait les services meilleurs : de toute évidence, pas spécialement.

 

Aussi, nous comprenons bien que l’effet du Service Charge sur la motivation ou la qualité du service rendu, n’est pas assuré. Mais ce n’est apparemment l’objectif principal de cette mesure :

Tout d’abord, remarquons que le Service Charge décourage l’absentéisme puisqu’il est proportionnel au nombre d’heures à l’année; d’ailleurs, dans certains hôtels, l’absentéisme a chuté de 30%.[4]

Ensuite, la question de la motivation, lorsque l’on travaille dans la restauration ou dans le tourisme, c’est aussi une question de vocation. On ne peut pas être serveur sans aimer le contact à la clientèle, sinon quoi, il faut se reclasser. Il s’agit, certes, d’un emploi difficile et contraignant dans certains cas, mais pas plus contraignant que celui des Polynésiens qui travaillent sur les chantiers de constructions et qui ont souvent des salaires de misères. Donc s’il n’est pas encore avéré que le Service Charge améliore la qualité des services clientèles, il n’est pas non plus prouvé qu’il décourage les employés à la tâche.

 

Le Service Charge, qui a fait ses preuves dans les pays d’Asie du Sud Est,[5] est une sorte de « pot commun » qui variera selon le chiffre d’affaire de l’hôtel ou du restaurant et qui devra profiter à tous les employés, sans exception. Il a certains avantages ; entre autres, une croissance assez rapide de son taux, qui équivaut dans certaines structures hôtelières à près de 75% d’un treizième mois pour 2008.[6] Pareillement au treizième mois, le service charge est soumis aux cotisations sociales. Il est considéré comme un salaire[7]. En plus, il n’entraîne aucun surcoût pour le client[8], pas plus qu’il n’a d’effet inflationniste.

En fait, tout repose essentiellement sur la terminologie de « Service Charge » qui n’est pas un pourboire qui mais se gagne sur le mérite, qui n’est pas un salaire mais induit des cotisations, qui n’est pas non plus une surtaxe mais qui apparait sur le ticket de caisse, qui est redistribué à tous les employés de l’entreprise, indépendamment de leur catégorie salariale.

 

Donc cette mesure, parce qu’elle n’est pas banale, peut être facilement contestée. Son inclassable terminologie nous mène à penser, que si ce n’est pas vraiment un pourboire et que si son objectif 1er n’est pas une amélioration des services clientèles, qu’est-ce qui empêchera, à l’avenir, de l’étendre à d’autres secteurs que ceux de l’industrie hôtelière? Cette question est légitime.

Pour l’instant nous avons une réponse : celle de la signature de la Convention du 12 décembre 2006, qui est le fruit du dialogue entre les partenaires sociaux et qui doit être comprise dans sa globalité.

Ne souhaitant pas aller à l’encontre de l’intérêt général et constatant que les résultats sont satisfaisants dans l’ensemble, nous émettrons un avis favorable à ce projet de loi de pays.

Je vous remercie de votre attention.       



[1] Hervé de Gaillande, Directeur de l’Inspection du Travail

[2] Employeurs : CPH, UPHO, SRBSB, CGPME. Organisations syndicales: CSTP-FO, A tia I mua, CSIP, Otahi.

[3] Permission d’absence de 3 jours, cas de maladie sans certificat médical

[4] Procès verbal de la commission, p. 5

[5] Assertion d’Hervé de Gaillande lors de la Commission de l’emploi

[6] 3% du bénéfice de l’entreprise  = 13ème mois de salaire

[7] Et par conséquent, exonéré de TVA : Hervé de Gaillande, Directeur de l’Inspection du Travail

[8] « pour l’instant, tel que cela a été pratiqué par les entreprises de plus de 50 salariés » Hervé de Gaillande

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