Le projet de budget 2010 au débat à l'assemblée de la Polynésie française
Séance du 12 novembre 2009
Intervention de Madame Eléanor PARKER sur le débat d’orientation budgétaire pour l’exercice 2010
Nous sommes enfin sur le débat d’orientation budgétaire pour l’exercice 2010. J’ai écouté avec beaucoup d’intérêts les interventions de nos collègues que je remercie d’ailleurs car, bien que n’ayant pas fait des hautes études de commerce ou d’économie comme vous monsieur le ministre de l’économie et des finances, néanmoins aujourd’hui je veux partager avec vous mon analyse de femme, d’élue mais surtout de mère de famille des archipels.
Dans le rapport que vous nous avez transmis, vos priorités pour l’année 2010 sont :
· La consolidation ou plutôt le sauvetage de l’activité touristique,
· L’instauration d’une politique volontariste de développement du secteur primaire (agriculture, pêche et perliculture) c’était déjà vos priorités l’année dernière et même depuis 2005 Monsieur le président rappelez vous bien de votre intervention à l’époque au sein de cette assemblée « il faut planter, planter, planter » même si nous n’étions pas inviter à Tikehau nous allons enfin concrétiser vos déclarations de planter avec ou sans l’aide de nos amis de Taiwan du 100% bio ?
Vous parlez de replacer le polynésien au centre de son développement, ancré sur sa terre, appuyé sur 2 piliers : le tourisme et le secteur primaire.
Puisque vous l’évoquiez dans votre discours et i l’on doit parler du tourisme ou plus précisément du touriste, la première question à se poser est la suivante :
· Pourquoi le touriste ne vient il pas chez nous ou pourquoi préfère-t-il une autre destination que la Polynésie ? Monsieur le ministre du tourisme je vous conseillerai de lire le dernier « Tahiti pacifique magasine (à la page p. 20 - Les scandaleux tarifs aériens qui sabotent le tourisme à Tahiti.» c’est édifiant
Et je dirai pour continuer tout simplement parce que chez nous, tout est cher. L’hébergement, l’alimentation, les activités touristiques, les produits locaux bref tout est cher.
· Et pourquoi cette cherté ?
Tout simplement pour pouvoir gagner sa vie le polynésien est dans l’obligation de proposer aux touristes ses services à un prix élevé, correspondant au prix du marché. De plus, nos polynésiens qui travaillent dans le secteur de l’hôtellerie ont de la difficulté à obtenir les postes d’encadrement perdent ainsi la motivation dans le travail, ce qui entraine corrélativement un service de qualité médiocre. Quand à nos hôtels n’en parlant pas, peu d’animations et d’activités sont proposés. Des études ont été faites démontrant que nous disposons d’un capital tant dans le tourisme « bleu » que dans le tourisme « vert », nous avons aussi la chance d’avoir une culture riche et variée et une tradition naturelle de l’hospitalité ; tous ces éléments pourraient constituer autant de thèmes porteurs d’une autre découverte de la Polynésie.
Donnons aux acteurs du tourisme les moyens nécessaires pour arriver à cet objectif : au propriétaire de pension de famille, au restaurateur dans les îles, au prestataire de service de locations en tout genre et même à l’artisan.
Des aides financières au travers de prêt bonifié ou de subventions à l’investissement, des aides à l’emploi ou des formations pour nos jeunes dans les métiers de l’hôtellerie et de l’artisanat. J’insiste sur le nécessaire effort en matière de formation.
La solution pour monsieur le ministre du tourisme serait de faire comme aux Marquises récemment, distribuer des bonne notes ou des étoiles suivant vos critères « La maison des invités » « NOHORAA MANIHINI NUI » pour mes amis marquisiens la traduction est « LA MAISON POUR BEAUCOUP DE TOURISTES » pour l’instant ce n’est pas plutôt « NOHORAA MANIHINI KO’E » on veut bien essayer ca ne coute rien.
Pour l’agriculteur, vous énoncez que ce sont les terres à cultiver qui manquent et les compétences techniques afin d’obtenir une production de qualité, en quantité suffisante et de manière constante notre maire de Taputapuatea Monsieur Thomas MOUTHAME n’a pas attendu le gouvernement pour mettre en application ce que vous proposez et à déjà commencé ces réunions d’informations et c’est gratuit.
Vous proposez la création d’un Fond d’investissement structurel afin de créer de nouveaux pôles de développement afin de revitaliser des activités qui pourraient favoriser l’émergence de filières présentant un intérêt pour le développement endogène et l’emploi local.
Rappelez-vous Monsieur le ministre l’annonce en 2005 de notre Président de retour des Etats Unis « L’indépendance grâce au NONI ». Qu’en est-il aujourd’hui ?
En ce qui concerne le groupe « TE MANA O TE MAU MOTU » nous ne faisons confiance que dans des valeurs sure comme le coprah qui à fait vivre des générations dans nos iles. Vous me parlerez du soutien de la caisse au coprah. Qu’en est-il des dérives ?
Pour le secteur primaire les problèmes sont pratiquement les mêmes et sont identifiés, je souhaite réellement qu’au travers du budget que vous nous proposerez, vous aurez mis les crédits nécessaires pour mener à bien ce grand chantier.
Vous soutenez que le gouvernement manque de marge de manœuvre pour :
· Assurer la pérennité de notre régime de protection sociale destiné aux plus démunis d’entre nous, le RSPF, et d’autre part,
· Permettre l’émergence de projets structurants destinés à soutenir un développement économique alternatif et complémentaire, notamment dans les archipels éloignés vous nous faites peur Monsieur le ministre entre l’alternatif et le complémentaire. Dans quelle farine serons nous roulé encore cette fois ci. Je pense aux projets HAOPA et des aéroports des Marquises et des Australes. En appui de l’idée qu’il faut mettre en place un nouveau modèle de développement économique et social et redonner ainsi à notre Pays un nouvel élan de croissance, vous proposez de modifier le dispositif de la CST et de créer une nouvelle taxe, la T.I.S (taxe intérieure de solidarité).
Pour la CST, vous proposez de créer une nouvelle tranche pour les salaires compris entre 350 000 FCFP et 700 000 F CFP et d’augmenter les taux de cotisation, de manière progressive, en ne touchant pas aux salaires inférieurs à 150 000 FCP. Encore heureux. Ce que vous ne dites pas c’est que pour certaine tranche leur cotisation atteindra les 22% ce qui représente pratiquement ¼ de leur salaire brut et il en sera de même pour les retraités.
Pour les professionnels vous proposez une augmentation « légère » au taux cependant de 10% nous n’avons pas la même notion de la légèreté Monsieur le ministre de l’économie et des finances sauf quand ca vous arrange je cite une de vos intervention à l’assemblée « Le pays à fait un effort énorme de réduction de l’ordre de 10% de ces dépenses » voyez vous, deux poids deux mesures.
Vous créez enfin une nouvelle taxe que vous avez intitulée la T.I.S (Taxe intérieure de solidarité). Elle affectera l’ensemble des transactions réalisées en Polynésie française portant sur les biens et les services pour un taux de 1.5%.
Vous estimez le produit de cette taxe à environ 13.5 milliards dont 2/3 seraient affectés au régime de protection sociale et le reste au F.I.S (Fonds d’investissement structurels).
Vous souhaitez encourager l’investissement en Polynésie mais je doute sincèrement que les nouvelles taxes dont vous proposez la création motiveront les investisseurs potentiels.
La création de cette nouvelle taxe dans les archipels éloignés est pour nous une fois de plus un leurre par rapport aux décisions de baisse du coût de la vie par la prise en charge du fret des matériaux de construction par le pays, vous reprenez d’une main ce vous donnez de l’autre.
Au moment même où la crise, si l’on peut encore l’appeler ainsi, atteint son paroxysme, vous nous proposez de créer de nouvelles taxes au nom de la SOLIDARITE. La SOLIDARITE a bon dos mais faut il encore que les institutions publiques soient solidaires en acceptant elles aussi une diminution de leur train de vie. L’ensemble des citoyens de ce pays et les acteurs de la vie économique et sociale le réclame à corps et à cri depuis quelques mois déjà, en atteste les conclusions des Etats Généraux.
Nous ne pouvons accepter ces nouvelles taxes en l’état car une fois de plus c’est la population qui fera les frais de l’opération. A terme la Santé nous coûtera encore plus cher demain.
A ce sujet nous avons appris que 43 postes seraient supprimés dans les îles, au ministère de la Santé, ce qui représente près de 10% de la réduction des effectifs dans l’ensemble des administrations du Pays. Pourquoi la Santé, un des droits, imprescriptibles reconnus à tous, fait elle les frais des restrictions budgétaires ?
Avez-vous, chacun dans vos compétences respectives, pris un moment dans une journée pour observer et rencontrer les gens dans la rue ?
Vous arrivent-ils de sortir de vos bureaux, d’aller au magasin et d’observer ces familles qui font leurs courses ?
Lorsque je lis votre rapport, mais peut être que je me trompe, j’ai réellement le sentiment que vous êtes déconnectés de la réalité. Une grande partie des familles polynésiennes essaient de survivre et c’est le mot qu’il faut employer SURVIVRE.
6000 emplois perdu depuis le début de votre gouvernement d’après nos amis syndicalistes et 5000 de plus si les taxes sont mis en places.
Et aujourd’hui au travers de ce rapport vous proposez comme solution, d’augmenter les cotisations des salariés et de taxer plus les patrons. Parlons clairement. Vous estimez donc que c’est aux patrons de payer.
A mon avis, et je pense que l’on n’a pas besoin d’avoir fait de hautes études pour comprendre ce qui va se passer, en taxant plus les patrons ils vont tout simplement augmenter leur prix pour rattraper cette augmentation de charges qu’ils auront subi. Au final, c’est encore les familles, déjà en difficulté qui vont passer à la caisse. Le cout de la vie augmentera d’environ 5%. C’est ce que traduise l’ensemble des médias.
C’est vrai pour vous Monsieur le Ministre de l’économie et des finances 5% d’augmentation ce n’est qu’une légère hausse.
Vous me rétorquerez, que les patrons pour plus de solidarité ne doivent pas augmenter leur prix !!!
Croyez vous que la crise n’a touché que le consommateur ? Avez-vous essayé juste un moment de vous mettre à la place des professionnels ? Vous pensez réellement que ces professionnels n’essaient pas aussi de survivre au travers de leur activité ? Pensez vous réellement, parce que c’est ce qui va se passer, que la solution c’est d’alourdir la charge des professionnels ? Quelle sera la conséquence directe ? des licenciements en cascade et des entreprises qui mettront la clef sous la porte. Moins de salariés, c’est moins de cotisations sociales, donc un risque certain pour le financement de la protection sociale, qui est financé à 70% par les salariés et qui a couté en 2009 plus de 100 milliards, les 3 régimes confondus. Vous voyez, Mr le Ministre.
Beaucoup de choses ont été dites, quelques solutions ont été proposées entre autre la baisse des indemnités des représentants et de ce geste fort qu’est la vente de l’avion. C’est de la démagogie et de la poudre aux yeux. Ceci dit,
Vous n’aurez rien régler, bien au contraire, vous aurez contribué à aggraver la situation critique dans laquelle se trouvent déjà nos familles mais aussi à mettre en péril notre système de protection sociale.
Moins d’investissement c’est moins de création de nouveaux emplois donc moins de cotisants et moins de consommateurs. Ce sera en revanche plus de familles sans revenus, à la rue, sans aucune possibilité d’offrir à leurs enfants la chance de faire de longues études, donc plus de sans formation et pour l’avenir plus de chômeurs et plus de misère. Nous aurons demain une société bien plus malade encore qu’aujourd’hui.
Donc pour toutes ces raisons, vous comprendrez qu’il n’est pas possible à notre groupe d’adhérer à vos propositions. Nous souhaitons que ce débat permette la prise de conscience qui vous conduirez à proposer un budget raisonnable sans augmentation de charges nouvelles, quitte à étaler dans le temps les nécessaires mesures de rattrapage et de réorganisation de l’ensemble de notre système et de notre société.
Je vous remercie de votre attention.
Eléanor PARKER