Rédaction relative à l’avis sur la proposition de loi concernant les conséquences environnementales des essais nucléaires.

Publié le par TEMOTEM

 

 

Rédaction relative à l’avis sur la proposition de loi concernant

les conséquences environnementales des essais nucléaires.

(Séance du 16 janvier 2012)

 

 

0040

 Mme Eleanor PARKER

 

 

Monsieur le Président de l’Assemblée de la Polynésie française,

Monsieur le sénateur de la Polynésie française,

Monsieur le président de la Polynésie française,

Mesdames et Messieurs les ministres,

Mesdames et Messieurs les représentants,

Mesdames, Messieurs,

 

Les essais se sont réalisés « sans que nos concitoyens se rendent réellement compte pour autant de l’impact que ces essais nucléaires avaient sur le territoire de la République où ils avaient lieu et …force est de constater que l’histoire de l’implantation du centre d’expérimentation du Pacifique, la mémoire des essais nucléaires et la connaissance de leur impact sur l’environnement et sur la société polynésienne demeurent peu connues et insuffisamment transmises. Il revient à l’État français de poursuivre la surveillance radiologique et géomécanique des atolls de Moruroa et Fangataufa. Il lui revient également d’amplifier ses efforts de dialogue et de concertation afin d’éviter les malentendus et les craintes …et le sentiment, justifié ou non, que le « secret-défense » masquerait des réalités peu avouables ».

 

Ces quelques lignes, qui pourraient venir de notre Président, sont en réalité tirées du rapport du Sénateur Roland COURTEAU sur les conséquences environnementales des essais réalisées chez nous.

 

Ces mots sont en droite ligne avec les préconisations du conseil interministériel de l’outre mer tenu le 6 novembre 2009  qui pour répondre à un « désir de mémoire » de la population polynésienne sur la période nucléaire préconisait notamment « la promotion des atolls de Mururoa et de Hao comme lieux de mémoire et comme lieux de connaissance scientifique et environnementale via des activités de recherche et d’observation.

 

Désir qui s’est encore exprimé non seulement dans cet hémicycle mais aussi à l’occasion des Etats généraux de l’outre mer : Il doit y avoir une reconnaissance concrète des conséquences sanitaires, environnementales et économiques de cette période.

 

Sur le volet sanitaire, la loi du 5 janvier 2010, dite MORIN, a, de l’avis même des élus nationaux « mis en place un mécanisme, dont l’application ne donne guère satisfaction ». Elle doit donc évoluer et nous espérons que le sénateur Tuheiava aura l’occasion de revenir sur ce point à l’occasion du débat sur le volet environnemental sur lequel nous rendons aujourd’hui notre avis.

 

Je tiens déjà à préciser que cette proposition de loi représente une avancée au regard des dispositions en vigueur qui, datant de 1964, indiquent qu’en « cas de cessation des activités du CEP, les atolls de Moruroa et de Fangataufa feront d’office un retour gratuit au domaine du territoire dans l’état où ils se trouveront à cette époque, sans dédommagement ni réparation d’aucune sorte de la part de l’État ». Ces dispositions proprement hallucinantes datent d’un autre temps. Je ne peux pas imaginer que la France se fourvoierait dans cette voie en nous laissant, en contradiction avec ses engagements internationaux, la charge de réparer et de surveiller les dégâts environnementaux causés par ses 40 années d’essais sur notre territoire.                         

 

Il faut aussi faire une précision. D’abord le CEP n’a pas cessé ses activités donc il n’y a aucune obligation pour l’Etat de respecter les dispositions de 1964. Cette loi prend donc le relais. Ensuite, le retour au domaine du Pays ne concerne que les parties terrestres des atolls. Donc on ne parle ici que d’une rétrocession partielle du domaine pour permettre à ce que des recherches scientifiques autres que militaires puissent y être menées.

 

Il y a encore dix ans personne n’aurait cru possible que de telles choses puissent être actées. Tout cela va donc plutôt dans le bon sens.

 

Car si les élus que nous sommes doivent tendre vers l’exemplarité en matière de gestion des deniers publics, l’Etat se doit lui à l’excellence dans sa communication et sa gestion des conséquences environnementales et sanitaires des essais. Il ne peut en être autrement.

 

L’élu qui s’y refuserait commettrait à mon sens un déni d’histoire et de démocratie et trahirait l’idéal Républicain de la nation française.

 

Certes le sujet n’est pas la seule priorité de notre population mais qui osera dire qu’elle n’en fait pas partie.

 

C’est vrai aussi qu’il y a un certain paradoxe à localiser le dispositif à ces deux atolls alors que visons, sur les conséquences sanitaires, un élargissement à l’ensemble du territoire. Il faudra donc veiller à ce que les recherches scientifiques soient, en tant que de besoin, étendues à des zones bien plus larges.

 

Le texte aurait dû également faire l’objet d’une plus large concertation avec l’ensemble des groupes parlementaires locaux. Des interrogations subsistent qui auraient dues être levées par la discussion. Néanmoins, la lecture du rapport sénatorial, dont je viens de citer quelques lignes, apporte un grand nombre de réponse sur la portée de ce texte, notamment au plan financier.

 

Et puis il est des opportunités qu’il ne faut pas rater.

 

En effet, le 11 mars 2011 a conduit à repositionner le nucléaire au cœur de débat politique national. Cette date est celle de la catastrophe nucléaire de Fukushima. La plus importante depuis 1986 et l’explosion de la centrale de Tchernobyl.

 

L’appréhension des populations quant aux risques liés à l’utilisation de l’énergie nucléaire a totalement changé. Elles sont en demande de plus de transparence et certaines ont même pris la décision d’en sortir. On nous dit, par exemple, aujourd’hui que les îles concernées, à savoir Moruroa et Fangataufa se situent dans des zones de reproduction des thons. Des scientifiques s’inquiètent, par ailleurs, d’avoir décelé chez certains de nos enfants des anomalies semblables à celles constatées chez les enfants de l’après Tchernobyl. Enfin, une étude récemment publiée s’inquiète d’une proportion plus élevée de leucémie chez les enfants vivant à proximité des centrales nucléaires.

 

Qui dans ce contexte peut se permettre de dire non à l’opportunité qui nous est offert d’une plus grande transparence ?

 

Certes, il restera, après le débat qui aura lieu mercredi au Sénat,  l’étape de l’Assemblée Nationale ou la majorité est différente. Mais quel est l’élu national qui osera dans ce contexte refuser le « droit et les aspirations des habitants de Polynésie française à mieux connaître la vérité sur cette part de l’histoire de France qui est d’abord, et sera pour longtemps, la leur ». Car en réalité nous n’en sortiront jamais.

 

Cette « fenêtre de tir » ne se représentera pas de sitôt. Il faut la saisir et au besoin, à l’occasion des présidentielles, ne pas hésiter à marquer l’opinion publique métropolitaine qui est très mal informée sur ce qui s’est passé durant les 183 essais réalisés sur les atolls de Moruroa et Fangataufa.

 

Je félicite donc le Sénateur Tuheiava pour cette initiative que nous soutiendrons.

 

 

Je vous remercie.

 

 

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article